Bilan du congrès d’Orientation 2023 du SNESUP
1) Objectifs et résultats du congrès d’orientation
Le congrès d’orientation du SNESUP, syndicat des enseignants de l’enseignement supérieur s’est rassemblé comme tous les 2 ans. Il est composé des délégués choisis par les sections en fonction du nombre d’adhérents par section. Ce congrès a pour but de définir l’orientation du syndicat et les revendications à défendre pour les deux prochaines années, concrétisées notamment par la rédaction de ses mandats et de l’appel du congrès. Le congrès a aussi choisi les représentants de sa commission administrative nationale, organe « parlementaire », et de son bureau, organe « exécutif », ainsi que ses secrétaires nationales. La constitution de ces deux instances est proportionnelle à l’expression des adhérents lors du vote d’orientation par liste constituée par les courants de pensée ou collectifs représentant la diversité du syndicat.
Nous saluons l’implication de tous les collègues et des personnels dans l’organisation de cet évènement, ainsi que pour l’animation des discussions lors des commissions et des séances plénières. Le meilleur moyen de prendre connaissance de ce gros travail d’écriture collectif et d’adoption démocratique est de lire les textes thématiques, les mandats, et l’appel de ce congrès, dont vous trouverez les liens ci-dessous :
https://www.snesup.fr/sites/default/files/fichier/appel-congres-snesup-fsu-230614.pdf
2) Une démocratie syndicale largement à améliorer
Au-delà de l’analyse de l’orientation de textes construits et adoptés collectivement lors de ce congrès, il y a cependant des marges importantes d’amélioration en ce qui concerne la démocratie interne du syndicat. Pour ce qui est du fonctionnement démocratique, le congrès laisse souvent un goût amer, en particulier pour les nouveaux et les jeunes congressistes.
D’abord dans l’organisation du travail des commissions thématiques : si, à l’issue de plusieurs heures de travail, émerge un consensus collectif, on peut cependant regretter que certaines propositions émises par les congressistes participants à ces commissions soient parfois filtrées ou transformées avant leur présentation en assemblée plénière, la rédaction des synthèses étant effectuée presque exclusivement par la ou les tendances majoritaires qui dirigent le syndicat. On doit s’interroger sur la nécessité d’avoir une représentation pluraliste lors de l’organisation de ces commissions et la rédaction des textes de synthèse, comme d’ailleurs de la rédaction de tous les textes émanant du syndicat (lettre flash, articles du mensuel syndical, textes à destination des collègues comme des tutelles, etc.).
Par ailleurs, la constitution du bureau national, organe exécutif du syndicat, est à géométrie variable. En effet, le nombre de ses membres n’est pas défini dans les statuts. Ainsi, le choix arbitraire de ce nombre et l’absence de seuil minimal en matière de représentation des tendances, permet donc à la tendance dirigeante de limiter, voire d’empêcher la représentation de tendances minoritaires en l’absence de règle claire. La demande d’une tendance de participer au bureau national a donc été refusée par la tendance majoritaire sur des bases qui restent très discutables. Il est donc urgent de fixer un nombre et un seuil minimal, voire de permettre une représentation minimale de toutes les tendances, souhaitable pour refléter la diversité des votes des adhérents, sans évidemment avoir une explosion de listes. Ces améliorations doivent être discutées pour plus de rigueur dans la constitution du bureau.
Autre pratique beaucoup plus violente, tellement elle est similaire aux pratiques du gouvernement actuel : durant le congrès, est procédé la réorganisation au fil de l’eau du fonctionnement et de l’agenda, à dessein. Ainsi la séance de présentation de différentes motions a d’abord été repoussée, en promettant une présentation plus tard, pour finalement que la tendance majoritaire refuse la présentation de certaines motions, avec l’argument du manque de temps. Cette technique permet d’écarter une nouvelle fois les « textes gênants » et l’expression de sensibilités différentes qui reflètent pourtant la richesse de notre syndicat. C’est d’autant plus critique que la majorité a décidé d’écarter une motion importante de positionnement urgent et très attendu concernant les enseignants du second degré en matière d’équité de traitement.
Enfin, on peut regretter que le vote de l’appel du congrès soit organisé à la dernière heure dans le programme du congrès, empêchant de nombreux congressistes (qui découvrent le texte au dernier moment, c’est nouveau !) de contribuer et de s’exprimer sur cet appel.
Ces nombreuses pratiques, « autorisées » par des statuts et un règlement intérieur qui certes ne peuvent pas tout régenter, ne sont plus compatibles avec le fonctionnement démocratique qu’on attend d’un syndicat national d’enseignants et d’enseignants-chercheurs. Or, une amélioration des statuts pour remédier à cette situation et permettre une participation démocratique de délégués des sections à la Commission administrative nationale du syndicat (les membres actuels sont cooptés par les courants de pensée) serait vraiment salutaire. Mais une fois de plus, elle a été refusée par la tendance majoritaire.
3) Une orientation qui privilégie un syndicalisme d’accompagnement au détriment d’un syndicalisme de lutte et de transformation sociale
Malgré le fait que le SNESUP soit historiquement un syndicat de lutte et de transformation sociale, il met ses pas depuis quelques années dans les ornières d’un syndicalisme d’accompagnement sous l’impulsion de la tendance majoritaire, « Action syndicale » et avec le laisser-faire d’ « École émancipée – PSO » . Le constat est pourtant partagé que le gouvernement utilise désormais la participation des syndicats dans les discussions comme un élément de communication pour avancer de prétendues consultations, mais sans réellement négocier ni prendre en compte les revendications syndicales. « Partenaires sociaux », « dialogue social », « corps intermédiaires », sont autant de vocables pour intégrer les syndicats aux projets gouvernementaux… Lors de ce congrès, des propositions à travers des motions ont été faites de refuser de discuter toute remise en cause de nos statuts (rapport Guerini), ou de discuter la destruction des organismes de recherche au profit d’ « agences de programme » (rapport Gillet), sans que la politique de la chaise vide soit systématique bien entendu. Cependant, la tendance majoritaire, encore une fois « Action syndicale », s’est largement exprimée pour aller discuter de ces propositions pourtant non négociables sur ces points précis.
4) Quelques préconisations et propositions pour améliorer le fonctionnement de notre syndicat
Il faut faire de nouveau confiance à tous les collègues motivés quel que soit leur courant de pensée, en leur donnant les éléments pour travailler, en évitant un contrôle et une centralisation excessive qu’on constate actuellement en bureau national et en commission administrative nationale du syndicat. C’est une urgence car les forces et les motivations pour s’engager à prendre de lourdes responsabilités deviennent trop rares et s’amenuisent dans toutes les tendances, avec la nécessité cette année de recourir exceptionnellement à un troisième mandat pour une des deux secrétaires générales (mandats usuellement limités à 2). A noter qu’il serait utile qu’une limitation des mandats successifs apparaisse formellement dans les statuts pour assurer le renouvellement démocratique. AGIR fait depuis plusieurs années cette proposition.
Lors des débats, les délégués ont aussi démontré une volonté de réaffirmer notre orientation historique de syndicat de transformation sociale. De nombreuses interventions ont eu lieu sur les modalités permettant de construire un véritable rapport de force, en allant au-delà d’un constat récurrent de dégradation continue de l’ESR imposé par le rouleau compresseur du néolibéralisme. L’exemple d’un syndicalisme de lutte et de transformation sociale dans le cadre de l’invitation de syndicats étrangers (exemple du SAES) démontre que seul le rapport de force et la discipline syndicale parviennent à obtenir des avancées, encore faut-il s’en donner l’objectif et donc les moyens.
Mais pour un rapport de force plus efficace, il faut se donner pour objectif une syndicalisation de masse et une revitalisation des sections d’établissements. C’est cet objectif que se fixe avec conviction notre collectif trans-tendances AGIR depuis sa création, avec notamment l’implication plus directe des sections dans la Commission administrative nationale du syndicat.
Tous ensemble, poursuivons.